Auguste LUTAUD, (1847-1925) – Premier Roi de l’ILE d’OR

Auguste LUTAUD, (1847-1925) – Premier Roi de l’ILE d’OR
Le 25 août 2025 à 11h30, un hommage à Auguste LUTAUD sera organisé par ses descendants au port du POUSSAI.
RENDEZ VOUS au Port du POUSSAI : Vous êtes invités à y participer, programme détaillé joint et avec une sardinade en clôture sur inscription.



Inscription obligatoire pour participer à la sardinade qui clôturera cet hommage à Auguste LUTAUD.

Copie de l’article de VAR MATIN du 20/08 signé Nicolas PASCAL



Petite Histoire de l’Ile d’OR
« J’ai découvert l’Ile d’Or en achetant sur plan, un appartement dans notre village de CAP ESTEREL en 1990.
En m’appuyant principalement sur les recherches réalisées par J.P Herreyres , François Guimard et Mme Anne Marie Guillot et Nobert Guillot, sur le livre de Mme Bureau-Lagane, et sur mes collections, je vais essayer de vous transmettre ma passion pour ce site unique (classé parmi les 60 plus beaux sites de France) à travers des documents qui retracent les 3 vies de cette ile et de ces 3 propriétaires très atypiques :
– Léon Sergent architecte – joueur de cartes.
– Auguste Lutaud : médecin – inventeur-constructeur de la Tour , Roi autoproclamé.
– François Bureau : commandant de marine – rénovateur- conservateur du patrimoine.
Philippe Pons

1897 – l’Ile d’Or qui appartient à l’Etat est mise en vente aux enchères.

Léon Sergent géomètre devenu architecte en devient le propriétaire au prix de 280 F.
Il construit notamment le grand hôtel de Boulouris, et de nombreuses villas à St Raphael, dont les Asphodèles, datant de 1885 réalisée pour un industriel anglais Sydney Bentall. Cette villa est devenue la mairie d’honneur de St Raphael.
1906 – L’épouse de Léon Sergent supportant mal le climat de la côte d’Azur, il vend une partie de ses biens et part s’installer dans le Jura.
Auguste Lutaud est le médecin de l’importante colonie Anglaise de St Raphael. Il est propriétaire de la villa les Mimosas à Valescure.
Dans une soirée de la bonne société raphaëloise, au cours d’une partie de whist bien arrosée , Léon Sergent perd une forte somme d’argent et propose à Auguste Lutaud de le rembourser en lui cédant l’Ile d’Or.

1891 – photo réalisée par James Jackson. Document BNF / Gallica



Les carrières du Dramont en exploitation, on aperçoit un débarcadère sur la plage et en arrière plan l’Ile d’Or, vers 1905 .
Cette photographie a été réalisée par Louis Bonnard, photographe du Touring Club de France, j’ai retrouvé cette photo dans les archives de la Médiathèque du Patrimoine en effectuant des recherches sur les photographies de E.A. Martel.

Février 1909 – un acte de vente est signé, le Docteur Lutaud acquiert l’ile pour 300 F / or.

Septembre 1909 – le docteur Lutaud décide de faire construire une tour sur son ile. Il est âgé de 62 ans.
En 16 mois , une tour sarrasine à base carrée surmontée d’un chemin de ronde crénelé est construite.
La pierre est extraite de l’ile par des carriers du Dramont.
La tour mesure 18 mètres de haut, 8 mètres de large, les murs ont 1 mètre d’épaisseur à la base, 5 étages.
1910, le 19 septembre le Dr Lutaud organise une grande fête pour l’inauguration de la tour.
” Sur ce «territoire indépendant» et pour parfaire ce moment solennel, une fanfare joue l’hymne national de l’île d’Or, lors de l’arrivée des nombreux invités, dont Angelo Mariani et Xavier Paoli. On note parmi une centaine de personnes, la présence du préfet du Var, Louis Hudelo, d’Oscar Roty, le célèbre graveur. Sans oublier Charles Carolus-Duran, artiste peintre. Tout cela sous un drapeau ceint d’une étoile et d’un croissant de lune. Ces privilégiés partent ensuite rejoindre la terre ferme du Dramont afin d’aller déjeuner avec les convives, dont de nombreux enfants, restés sur le continent.” copie du Blog Angelo Mariani

1910 – Banquet d’Inauguration – document JP Herreyres
Le Dr LUTAUD se proclame « Roi de l’Ile d’Or » sous le nom d’Auguste 1er.
Ce lundi 19 septembre 1910, le « roi » Lutaud, le jour de son investiture, choisit une petite fille méritante du Dramont. Selon certains, cette jeune enfant n’est autre que la fille d’un contremaître italien, tailleur de pierres de la carrière du Dramont. Elle se nomme Amélie BORGINI. Auguste LUTAUD la désignera « marraine de l’île d’Or ». Après avoir reçu sa couronne et son sceptre,

Angelo Mariani tout de blanc vêtu à genou devant la marraine : Amélie BORGINI . Derrière elle, le docteur Lutaud . (document site Angelo Mariani )
Analyse de la photo de la cérémonie par Anne Marie Guillot
La photo montre Mariani, la clé de l’Ile à la main, qu’il remettra ensuite à la petite fille, chargée de l’offrir au roi Lutaud. Neptune, Antoine Coysevox 1705
De son côté Amélie tient dans sa main droite ce qui sert de sceptre. On ne voit que sa partie supérieure terminée par une fourche.
On retrouve cette fourche sur les armoiries de la Médaille qui sera remise aux invitées : un caducée y figure terminé par une fourche. Le caducée rappelle la profession de Lutaud (médecin) et la fourche celle de Neptune, Dieu de la Mer. Ces 2 symboles rappellent les 2 casquettes de Lutaud, médecin et roi de l’ile, voire même ses 2 personnalités, bon vivant mais aussi médecin. Amélie conserva la clé. Elle permettait aux cousins, restés au Dramont, de prouver leur appartenance à la famille d’Amélie et de s’approcher de l’ile privée, voire d’y accoster, pour y pêcher.
Au cours de cette cérémonie, l’île est baptisée l’île Sainte Amélie. Mais elle ne conservera pas longtemps ce nom qui est même effacé des mémoires. Auguste 1er reçoit sa couronne et son sceptre et écoute avec attention les quelques vers récités par la marraine :
Sire, acceptez sur ce plateau
Cette clef de fleurs entourées ;
Que cet hommage vous agrée,
O Roi, le premier des Lutaud !
Grand souverain de l’île d’Or.
Pour vos sujets, soyez un père.
Que votre règne soit prospère
Pendant de bien longs jours encore – Vive le roi de l’île d’Or » !
Extrait St Raphael Journal – 1910
Dans la foulée, il frappe monnaie, timbre et papier officiel avec la création d’un hymne national.


– Médaille en argent de 35 mm de diamètre, poids : 21 G, frappée par L. Patriarchi.- Photos et Collection Philippe PONS
Analyse de la Médaille commémorative par Norbert Guillot
Une Médaille est éditée pour l’occasion, offerte aux invités, d’argent ou de bronze sans doute selon le rang de la personne.
I-/-Le revers
La tour sur son rocher éclairée par un croissant de lune et une étoile. Les rais sur la gauche correspondent à une symbolique qui nous échappe. Autour de l’ensemble l’inscription « Augustus Primus Insulae Aureæ Proprio Motu Rex”— Auguste Premier de sa propre volonté roi de l’île d’Or — En bas à droite, une inscription L. Patriarchi, le nom du graveur I
I/ Le recto :
L’Ecu : les armoiries au centre du recto et leur signification héraldique – Ornements extérieurs de l’écu : L’écu se présente avec en chef une couronne royale et en soutien deux salamandres (sous toutes réserves). La salamandre est le symbole de la pierre portée au rouge, ici elles sont dites rampantes selon le vocabulaire héraldique (c.a.d. dressées sur une patte) – Ecu écartelé dont tous les quartiers présentent des traits horizontaux symbolisant les ondes c.a.d. la mer

– En 1 : une tour posée sur un rocher
– En 2 : un croissant tourné en senestre, accompagné en abîme (centre) d’une étoile à 5 pointes (branches). Senestre en langage héraldique c’est la droite et non la gauche car la description se fait depuis le porteur d’arme et non depuis l’observateur. Tourné vers la droite il symbolise la prospérité glorieuse
– En 3 : un caducée rappelant sa profession, terminé par une fourche telle celle de Neptune, Dieu de la Mer. Ces 2 symboles (caducée et fourche) rappellent donc la profession de Lutaud et sa fonction de roi de l’Ile transformée en Dieu.
– En 4 : une langouste, signe d’abondance en langage héraldique –
La devise : « Insulae Aureæ Proprio Motu »/ Ile d’or de sa propre initiative. Sans doute s’agissait-il d’avancer que l’île était reconnaissable entre toutes ce qui justifie d’ailleurs la devise adoptée par Lutaud mais qui ne figure pas comme telle sur la médaille : « Ton salut est dans la sincérité ». Dans cette devise est incluse, au début de la phrase et en Arabe oriental selon le calendrier hégirien ١٢٢٧ (1227) soit 1812 du calendrier grégorien ce qui ne correspond à aucun événement pour le royaume. On peut supposer qu’en réalité il s’agit de ١٣٢۷ (1327) soit 1909 date d’acquisition de l’île. Le second chiffre ٣ étant, par méconnaissance de l’Arabe ou par difficulté de gravure, devenu ٢.
– Le cadre vierge au bas de l’écu : Emplacement destiné à recueillir le nom de la personne à laquelle elle sera destinée – La date d’émission : Tout en bas MCCCXXVIII (1328) soit 1910 date à laquelle est proclamé le royaume : 19 septembre 1910 ou 14 Ramadan 1328.
– Tout autour de la médaille une inscription en caractères arabes الجَازِير الصّدق « l’île crédible » ou île (el djezair) sincère authentique, répétée quatre fois. Cette devise en arabe est sans doute un clin d’œil d’Auguste Lutaud à son frère, gouverneur d’Algérie, invité à la cérémonie.
Auguste Ier émet dès 1910[ des vignettes bleues et blanches aux formats portait — 19 × 24 mm — et paysage — 40 × 23 mm —, ayant l’apparence de timbres postaux, commémorant l’avènement de son royaume.


1913 : Auguste Ier donne une grande fête en l’honneur de la visite officielle de son frère cadet Charles Lutaud (1855-1921) gouverneur général de l’Algérie de 1911 à 1918.




Le Petit Niçois -1913
Les facettes du Docteur LUTAUD ?
Il est décoré de la Légion d’honneur en 1883.
1914 – Avec la Grande Guerre qui commence le Dr Lutaud retourne en Bourgogne et devient médecin à Macon dans les hopitaux militaires.
Directeur de publication de L’Argus médical (1896-1898), du Journal de médecine de Paris et de La Médecine anecdotique, historique, littéraire (1901-1904), Auguste Lutaud est aussi à l’origine de la publication du Parnasse hippocratique, recueil de poésies fantaisistes, tirées de différents auteurs plus ou moins drôlatiques, sous le pseudonyme de Docteur Minime en 1884.

Auguste LUTAUD fut un opposant aux vaccins et à PASTEUR
« M. Pasteur ne guérit pas la rage, il la donne. » Voici comment le Dr Auguste Lutaud introduit son livre : « Il y a un an que M. Pasteur communiquait à l’Académie de médecine un procédé de traitement infaillible de la rage. Ce traitement, pompeusement et bruyamment annoncé, s’appuyait alors sur un seul fait : la guérison (?) du jeune Meister. […] Négligeant la clinique, foulant aux pieds les données les plus élémentaires de la médecine traditionnelle, M. Pasteur, nouvel hercule, s’était contenté de la simple affirmation. Nouveau prophète, il avait posé les fondements d’une nouvelle église. Tel s’est présenté le célèbre chimiste lorsqu’il a prétendu avoir trouvé un traitement infaillible de la rage, avant même que le temps nécessaire à l’incubation de la maladie ait permis de contrôler cette téméraire affirmation. Non seulement M. Pasteur affirmait sans preuves, mais il employait pour la divulgation de cette prétendue découverte des procédés que la science, et particulièrement la science médicale, a toujours considérés comme indignes d’elle. […] C’est alors que nous avons entrepris dans le Journal de Médecine cette lutte qui dura plus d’une année. Ceux de nos lecteurs – et ils sont nombreux – qui ont appuyé nos efforts et nous ont aidés de leurs conseils, ont pu seuls comprendre combien il a été difficile de recueillir les documents qui ont permis de démontrer que non seulement M. Pasteur ne guérissait pas la rage …



Message à son ami Angelo MARIANI , inventeur en 1863 d’une boisson à base de feuilles de coca macérées dans du vin.

La BNF conserve 52 livres rédigés par Auguste Lutaud, dont de très nombreux sur la gynécologie.
Quand il revient au Dramont, il recevait en consultation les ouvriers de la carrière.


Il meurt en 1925, sans avoir abdiqué. Une urne contenant ses cendres repose dans un rocher au pied de la Tour.
Le docteur a eu deux fils : Paul et Léon.
Suite de l’Histoire de l’ile d’OR

1944 – 14 Aout, débarquement allié en Provence, la plage de galet du Dramont est un des sites choisis par les Alliés.
C’est la 36eme division du Texas en compagnie de la 1ere division blindée Française qui débarque.
La Tour subit des dégâts lors des bombardements du 15 Aout 1944, et tout l’intérieur de la Tour est détruit par un incendie en 1945, lors du feux d’artifice du 15 août.

1950 – Sur cette photo aérienne datant des années 50, on aperçoit en arrière-plan, les carrières du Dramont encore en exploitation, et les maisons des mineurs avec l’école. L’exploitation de la carrière prendra fin en 1959. Collection JP Herreyres

Et dans les années 60, avec les campeurs commencent à profiter de la vue sur l’Ile d’Or. Edition MAR – collection Ph Pons

Sur la ligne du PLM (Paris-Lyon-Marseille) les compartiments étaient décorés avec des photos N/B encadrées dans de l’aluminium. L’Ile d’Or faisait partie des illustrations.
Grand merci au service archives de la SNCF qui m’ont transmis ce document , mais la légende inscrite sur la photo : l’Ile Rousse- Corse est erronée, et le nom du photographe n’est pas identifié.

En 1962 l’ile d’Or est vendue par Léon Lutaud, fils d’Auguste au commandant François Bureau.
François Bureau officier de Marine entreprend la remise en état de la Tour, il refait les étages, installe des citernes, un groupe électrogène et fait livrer des tonnes de terre pour créer un jardin méditerranéen.
Il passe tous les étés en famille sur son ile. François Bureau se noie en 1994, en faisant le tour de son Ile.

Travaux de restauration de la tour. photo Philippe Pons vers 1995.

Le livre de référence sur l’ile d’OR , de Mme Laurence Bureau-Lagagne


2013- La planche de timbres du centenaire de l’Ile d’OR , avec le cachet du premier jour. – Collection François Guimard.

2020- Deux portraits de mon ami christian Lutaud, propriétaire à CAP ESTEREL, et arrière petit fils du docteur Lutaud. Photos Philippe Pons.

Pour tout connaitre sur l’Ile d’OR …

Cet article de WIKIPEDIA a été labelisé en 2020, en article de QUALITE.
Il a été rédigé par un ancien propriétaire de CAP ESTEREL avec lequel j’ai beaucoup échangé lors de la rédaction de mon premier article sir l’Ile d’OR en 2020.

Et le livre hors série de JP Herreyres, l’historien du Dramont, qui est à nouveau disponible à la SHFR / Société d’Histoire de Fréjus